Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Nous avons déjà posé quelques idées... ici et ! Mais il nous fallait une caution de l'intérieur, pour s'assurer que nous n'étions pas à côté de la plaque. Voici l'échange que nous avons eu avec Ameleia, professeur de lettres modernes et de Théâtre à Clermont-ferrand (sa page facebook ): la première partie de ses réponses sont sur le blog de La Nymphette ici, et la suite est donc là...     

 

L'ECOLE (suite)
Quels sont les grands changements de société qui influent le plus sur le métier de professeur et la mission de l’école (féminisme, précarisation de l’emploi, questionnement religieux ou identitaires…) ? L’éclatement du modèle de noyau familial a-t-il une conséquence sensible sur les élèves et leur relation à l’autorité / l’apprentissage ? Tous ces aspects ne sont pas débattus à l'école alors qu'ils sont le lieu des premiers conflits.

Tout ce que vous nommez a lieu. Nous sommes le premier observatoire de la société. Il fallait peut-être nous écouter un peu plus... Tiens, La fameuse question de l'autorité : je crois qu'elle a été dangereusement mal formulée. Mal interprétée aussi, elle a été récupérée par les médias et les politiques comme une fausse religion. Nous n'avons jamais cessé d'exiger. Les élèves veulent des repères fiables, justes, forts même. Mais ils veulent à raison des règles adaptées, toujours mobiles, bien sûr parce qu'eux aussi changent. Je ne sais pas si nous avons su nous adapter. En même temps, l'exigence doit être supérieure toujours et doit  savoir se maintenir. Restez proche et élever demeure la préoccupation principale qui doit nous éloigner de tous les faux débats à la mode.

 

On parle du système nordique comme du meilleur qui soit, avec le plus de réussite, et plus complet en terme de connaissance et de temps pour d’autres activités. Es-tu d’accord ?      
Oui. Avec un bémol. Ils sont beaucoup moins nombreux que nous, ce qui facilite terriblement la tâche. Déjà il suffit que l'on observe la formation des enseignants. Ils suivent un parcours universitaire concomitant avec la formation pédagogique. Nous nous faisons le contraire. Et ça va même en s'empirant puisqu'on repousse en amont la formation concrète en prolongeant le cycle universitaire. Et puis personne ne m'ôtera de l'idée qu'une classe avec moins de 20 élèves et deux enseignants dont un est chargé de faire travailler les élèves en difficulté ne peut pas donner le meilleur. En France nous marchons à l'envers.

 

Le succès de « Entre les murs » est-il pour toi un encouragement pour le système éducatif ou une « publicité pour cancres » comme on a pu lire dans certaines critiques ?            
Il n'est ni l'un ni l'autre. C'est un excellent film. Il donne une température de notre système éducatif. Par son réalisme cru, il ne drague personne mais dresse un constat tragique de société. Les gens y ont beaucoup projeté leurs craintes, leurs préjugés sans doute pour se rassurer eux-mêmes. Beaucoup de profs se sont mis en colère en oubliant que c'était du cinéma et que le film était extrêmement scénarisé. Je ne vois en revanche aucun humanisme dans son message. Pour autant je l'accepte comme une lecture terrible et réaliste de notre société. Je peux attester de la réalité de ce qui y est décrit pour une classe sur 4. (même dans un établissement de centre ville en Province !)

 

LES OUTILS

Quelles sont les pistes nouvelles pour attiser la curiosité de tes élèves ? Quels projets innovants te semblent avoir fonctionné ?

L'ouverture sur l'extérieur. Le travail en équipe avec les multimédias. Les évaluations fondées sur la réalisation de projets concrets. Plus je vieillis dans ce métier plus je crois en cette méthode.

Un vieux truc qui marche : Retravailler à partir des travaux des élèves. C'est le principe que je mets en place en soutien. Les élèves retravaillent systématiquement leur contrôle, ont la possibilité de remonter leur note. Remis en selle, ils ne perdent pas confiance et progressent.

 

Quel livre recommandes-tu le plus à tes élèves ? Quel film ?

Tout ce qui me vient à l'esprit pendant un cours. Tout est occasion à ouvrir une parenthèse. Je fais des comparaisons avec le dernier Spiderman, je raconte Madame Bovary. Parfois, comme ça gratuitement, quand je sens les élèves fatigués, je raconte le livre que je suis en train de lire. Etonnamment, ils écoutent, ils le lisent s'il est pour eux, ou l'offrent à leurs parents.

 

Utilises-tu les nouvelles technologies ?

Oui bien sûr. Mes élèves viennent sur mon blog. Et je les publie parfois. Je lance des actions qu'ils doivent mener. Les fameux « commandos ». On ne peut plus les arrêter. 

 

Que souhaiterais-tu faire passer comme message sur ton métier, l’école, tes élèves ?

Je sors ma barbe de vieux sage pour dire que je n'ai surtout pas de messages !

En revanche, j'inviterais celui qui se prend à juger l'école ou les profs et tout ce qui la concerne à venir une journée à l'école : une heure observer ce qui se passe dans une classe, passer une récré dans la cour, circuler dans un couloir bondé à l'heure de la sortie, manger à la cantine de l'école, retourner observer une heure de cours... tout cela invite à suspendre son jugement...

Ameleia nous te remercions pour le temps que tu as pris, pour la richesse de tes réponses : cela nous donne envie de venir nous glisser au dernier rang et d'observer... Merci !

Tag(s) : #Actualités à partager
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :